Maladie de Huntington : regard sur les soins de longue durée, l’utilisation de médicaments et les visites en clinique
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Le 21 novembre 2024 — La maladie de Huntington (MH) est une maladie rare et héréditaire qui se manifeste par des troubles physiques, cognitifs et psychiatriques. La MH est incurable, mais certains médicaments peuvent contribuer à atténuer les symptômes. La tétrabénazine est le seul médicament approuvé au Canada pour la MH et est indiquée pour la chorée, un trouble du mouvement caractéristique de la MH. L’analyse de l’ICIS a examiné la population adulte atteinte de la MHNote de bas de page i et les soins dispensés dans les établissements de soins de longue durée (SLD) et en clinique, y compris les médicaments prescrits aux résidents en SLD. L’analyse a été réalisée avant qu’un traitement modificateur de la maladie ne soit disponible.
Environ 6 000 personnes sont atteintes de la MH au Canada et 7 500 autres sont considérées comme à risque sur le plan génétique¸éé´Úé°ù±ð²Ô³¦±ð²õ1. Les symptômes apparaissent habituellement entre 35 et 55 ans, et le décès survient généralement de 10 à 20 ans après le diagnostic¸éé´Úé°ù±ð²Ô³¦±ð²õ2, ¸éé´Úé°ù±ð²Ô³¦±ð²õ3. En général, les personnes au stade précoce de la maladie vivent à la maison et reçoivent des soins médicaux de routine dans une clinique ou un établissement de soins primaires, puis, au stade avancé, elles sont admises dans un établissement de SLD¸éé´Úé°ù±ð²Ô³¦±ð²õ3. Certains patients nécessitent des soins de courte durée en raison de chutes, d’infections ou de problèmes psychiatriques.
Les résidents en SLD atteints de la MH requièrent un large éventail de soins
À mesure que la maladie progresse, la dépendance physique et la déficience cognitive augmentent. Les besoins en matière de soins deviennent importants et peuvent être difficiles à gérer à la maison. Des facteurs non médicaux, comme l’accès aux services à domicile et aux soins informels ainsi que les considérations financières, peuvent avoir une incidence sur le moment d’admettre une personne atteinte de la MH en établissement de SLD.
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Quand un lit s’est libéré pour ma mère, nous étions prêts. Elle avait été hospitalisée après avoir fait plusieurs vilaines chutes et placée en haut de la liste pour être admise dans un établissement de SLD. Le nombre d’heures offertes pour les services à domicile était insuffisant, ce qui était difficile pour notre famille. Nos options étaient limitées puisque nous dépendions des services financés par le gouvernement. — Jenna Shea, aidante naturelle, Ontario
En 2021-2022, il y avait 496 résidents en SLD atteints de la MH au Canada. Ils présentaient différentes caractéristiques de santé, dont bon nombre correspondaient au stade intermédiaire ou avancé de la maladie¸éé´Úé°ù±ð²Ô³¦±ð²õ2. Comparativement aux autres résidents en SLD, ceux atteints de la MH présentent un plus grand déclin dans de nombreux aspects de leur santé et ils sont environ 18 ans plus jeunes, en moyenne. Parmi les 83 personnes atteintes de la MH nouvellement admises en SLD, les caractéristiques de santé étaient légèrement meilleures, mais la maladie démontrait tout de même des signes de progression. (Consultez les tableaux de données pour obtenir un complément d’information.)
- 53 % des résidents en SLD atteints de la MH présentaient une déficience cognitive grave, et 59 % étaient dépendants ou entièrement dépendants des autres pour les activités de la vie quotidienne (AVQ)Note de bas de page ii.
- Les résidents souffrant d’une déficience cognitive affichaient généralement de moins bonnes caractéristiques de santé que ceux qui n’avaient aucune déficience cognitive.
- De nombreux résidents en SLD souffrant de la MH avaient de la difficulté à avaler (75 %), avaient perdu du poids récemment (25 %), étaient incontinents (60 %) et avaient besoin d’un fauteuil roulant pour se déplacer (63 %).
- Environ 50 % des résidents en SLD atteints de la MH manifestaient des symptômes psychologiques et comportementaux, y compris la dépression et l’agressivité.
- Un sous-ensemble de résidents en SLD touchés par la MH (10 %) ne présentaient aucune déficience cognitive et pouvaient effectuer les AVQ de façon autonome.
Figure 1 — Prévalence de certaines caractéristiques de santé parmi les résidents en SLD atteints de la MH et la population générale en SLD, 2021-2022
Ce diagramme à barres montre le pourcentage de résidents en SLD atteints de la MH* qui présentaient certaines caractéristiques de santé ainsi que le pourcentage de l’ensemble des résidents en SLD†qui présentaient ces mêmes caractéristiques de santé en 2021-2022; 53 % des résidents en SLD atteints de la MH présentaient une déficience cognitive grave (comparativement à 34 % de l’ensemble des résidents en SLD); 59 % des résidents en SLD atteints de la MH étaient dépendants ou entièrement dépendants pour les AVQ (comparativement à 39 % de l’ensemble des résidents en SLD); 48 % des résidents en SLD atteints de la MH manifestaient des comportements agressifs (comparativement à 40 % de l’ensemble des résidents en SLD); 46 % des résidents en SLD atteints de la MH souffraient de dépression (comparativement à 31 % de l’ensemble des résidents en SLD); 60 % des résidents en SLD atteints de la MH souffraient d’incontinence urinaire (comparativement à 43 % de l’ensemble des résidents en SLD); 60 % des résidents en SLD atteints de la MH souffraient d’incontinence fécale (comparativement à 40 % de l’ensemble des résidents en SLD).
Remarques
AVQ : Activités de la vie quotidienne, dont l’hygiène personnelle, l’utilisation des toilettes, la locomotion et l’alimentation.
Les statistiques pour les résidents en SLD atteints de la MH incluent des données de Terre-Neuve-et-Labrador, du Nouveau-Brunswick, de l’Ontario, de la Saskatchewan, de l’Alberta et de la Colombie-Britannique.
Sources
* Système d’information sur les soins de longue durée et Système d’information intégré interRAI, 2021-2022; Institut canadien d’information sur la santé.
†Institut canadien d’information sur la santé. Profil des résidents des établissements de soins en hébergement et hôpitaux de soins de longue durée, 2021-2022. Ottawa, ON : ICIS; 2022.
Les médicaments jouent un rôle important dans la gestion des symptômes des résidents en SLD atteints de la MH
Sur une période d’un an, 91 % des résidents en SLD souffrant de la MH se sont vu prescrire 5 catégories de médicaments ou plusNote de bas de page iii et 15 % se sont vu prescrire 15 catégories de médicaments ou plus (comparativement à 88 % et à 20 % de l’ensemble des résidents en SLD, respectivement).
- La catégorie des antipsychotiques était la principale catégorie de médicaments prescrits aux résidents en SLD atteints de la MH (prescrits à 81 % des résidents en SLD atteints de la MH). Les principales substances chimiques étaient l’olanzapine (31 %), la rispéridone (29 %), l’halopéridol (22 %) et la quétiapine (22 %).
- La tétrabénazine était prescrite à 10 % des résidents en SLD souffrant de la MH.
- Des médicaments pour traiter la dépression, les convulsions et l’anxiété étaient fréquemment prescrits, et leur taux d’utilisation dépassait la prévalence des problèmes de santé traités par ces médicaments chez les résidents en SLD atteints de la MH.
Figure 2 — 7 principaux médicaments prescrits aux résidents en SLD atteints de la MH sur une période d’un an*, selon le taux d’utilisation
Ce diagramme à barres montre les 7 principaux médicaments prescrits aux résidents en SLD atteints de la MH et présente leur taux d’utilisation comparativement à celui de l’ensemble des résidents en SLD. La catégorie des antipsychotiques était la principale catégorie de médicaments prescrits aux résidents en SLD atteints de la MH (81 % de tous les résidents en SLD atteints de la MH comparativement à 44 % de l’ensemble des résidents en SLD), suivie par les antidépresseurs (75 % comparativement à 66 % de l’ensemble des résidents en SLD), les médicaments contre la constipation (56 % comparativement à 39 % de l’ensemble des résidents en SLD), les autres analgésiques et antipyrétiques contre la douleur et la fièvre (52 % comparativement à 50 % de l’ensemble des résidents en SLD), les médicaments pour traiter les convulsions (37 % comparativement à 12 % de l’ensemble des résidents en SLD), les médicaments contre l’anxiété (36 % comparativement à 20 % de l’ensemble des résidents en SLD) et les opioïdes (31 % comparativement à 40 % de l’ensemble des résidents en SLD).
Remarques
* Consultez les notes méthodologiques pour obtenir des précisions.
Les groupes de médicaments sont définis selon le niveau 3 du système de classification anatomique, thérapeutique et chimique (ATC) de l’Organisation mondiale de la santé (OMS).
Cette figure inclut des données de Terre-Neuve-et-Labrador, de l’Ontario, de la Saskatchewan et de la Colombie-Britannique.
Sources
Système national d’information sur l’utilisation des médicaments prescrits, 2021 à 2023; Système d’information sur les soins de longue durée et Système d’information intégré interRAI, 2021-2022, Institut canadien d’information sur la santé.
Les données sur les médicaments de l’ICIS ne contiennent pas la raison de l’ordonnance; il devient donc difficile d’interpréter l’information sur les médicaments utilisés hors indication, ce qui est courant pour les patients touchés par la MH. Par exemple, les antipsychotiques sont souvent prescrits hors indication pour traiter la chorée, compte tenu des effets secondaires de la tétrabénazine et de l’efficacité des antipsychotiques pour traiter d’autres symptômes de la MH, comme la psychose, l’agressivité et la dépressionReference3 ¸éé´Úé°ù±ð²Ô³¦±ð4. Les antipsychotiques atypiques (c’est-à -dire de deuxième génération), comme l’olanzapine, la rispéridone et la quétiapine, sont utilisés en première intention parce qu’ils sont bien tolérés¸éé´Úé°ù±ð²Ô³¦±ð4 ¸éé´Úé°ù±ð²Ô³¦±ð5.
Malgré l’avancée des outils de diagnostic, la MH peut être mal comprise par les professionnels de la santé
Avec la disponibilité des tests génétiques et les autres avancées médicales, les erreurs de diagnostic et les diagnostics tardifs de la MH sont de moins en moins fréquents. Toutefois, des erreurs de diagnostic et des diagnostics tardifs peuvent encore survenir en raison de la rareté de la maladie, du délai entre l’apparition des symptômes neuropsychiatriques et des symptômes moteurs, et du manque d’information sur les antécédents familiaux découlant de la stigmatisation associée à la MH, entre autres facteurs¸éé´Úé°ù±ð²Ô³¦±ð²õ6.
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Ma grand-mère maternelle vivait dans un village isolé de l’Ontario. Sa maladie a été mal diagnostiquée pendant 20 ans, jusqu’à la fin des années 1960, et a été confondue entre autres avec la schizophrénie. Ma mère avait une perception complètement erronée d’elle-même au début de l’âge adulte, ce qui a retardé son diagnostic de plus de 20 ans. La MH l’a amenée à croire qu’elle allait bien. Elle refusait de se faire examiner par des médecins, même si elle avait une démarche chancelante, tombait et souffrait de dépression et de paranoïa. La tutelle légale a été la seule façon de l’aider. — Timothy Irwin, personne atteinte de la MH, Ontario
De plus, les dispensateurs de soins non spécialisés ne savent pas nécessairement comment reconnaître la MH ou n’ont pas l’expérience requise pour poser le bon diagnostic, ce qui peut entraîner des erreurs et des soins sous-optimaux¸éé´Úé°ù±ð²Ô³¦±ð²õ7, ¸éé´Úé°ù±ð²Ô³¦±ð²õ8, ¸éé´Úé°ù±ð²Ô³¦±ð²õ9.
- Dans l’analyse des SLD de l’ICIS, 6 % des résidents en SLD atteints de la MH avaient reçu un diagnostic de schizophrénie à plus d’une reprise, bien que les critères de diagnostic clinique (Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux, cinquième édition, ou DSM-5) indiquent de ne pas diagnostiquer cette maladie si les symptômes sont attribuables à d’autres problèmes de santé¸éé´Úé°ù±ð²Ô³¦±ð²õ10.
- De plus, l’analyse de l’ICIS sur les données des cliniques de consultation externe révèle qu’un petit nombre de patients ayant la MH avaient des diagnostics concomitants de la maladie de Parkinson ou de la maladie de Pick (démence frontotemporale). Il est peu probable que ces affections touchent une personne atteinte de la MH, mais leurs symptômes peuvent être confondus avec ceux de la MH.
- Malgré la présence de symptômes moteurs ou cognitifs, un pourcentage élevé (45 %) de résidents en SLD atteints de la MH n’avaient reçu aucune forme de traitementNote de bas de page iv même si les pratiques exemplaires pertinentes indiquent leur utilité pour cette population¸éé´Úé°ù±ð²Ô³¦±ð²õ3.
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Souvent, les établissements de SLD se partagent les services d’ergothérapeutes et de physiothérapeutes, et ils n’ont pas nécessairement la capacité d’accueillir un plus grand nombre de résidents. Les travailleurs sociaux de la Société Huntington du Canada doivent aussi sensibiliser les dispensateurs pour leur faire comprendre que ces services aident les résidents atteints de la MH à conserver leurs capacités et leur force plus longtemps. — Angèle Bénard, ancienne directrice nationale pour les services aux familles, Société Huntington du Canada, Ontario
Aperçu des constatations cliniques
Les données soumises à l’ICIS par les cliniques de consultation externe de l’Alberta en 2022-2023 visent les soins dispensés dans les cliniques qui traitent notamment des patients atteints de la MHNote de bas de page v. Bien que ces soumissions de données soient partielles, les cliniques représentent un point de service important pour les patients atteints de la MH. C’est pourquoi nous avons inclus l’information sur les patients dans la mesure du possible. L’analyse de l’ICIS comprend 69 patients atteints de la MH qui ont un âge moyen de 58 ans et qui ont effectué au moins une visite dans une clinique. Parmi ces patients, 51 % étaient des hommes et 86 % vivaient en région urbaine. Les données soumises par les cliniques mettent en évidence l’importance de la neurologie, des infirmières autorisées, de l’ergothérapie et des soins virtuels chez les personnes âgées.
Les soins cliniques pour la MH varient au Canada notamment sur le plan de la composition et de l’emplacement des équipes de soins, des modes de visite et des déplacements en vue de recevoir des soins, ce qui peut nuire à la généralisabilité de nos constatations¸éé´Úé°ù±ð²Ô³¦±ð²õ11.
Prochaines étapes
La population de résidents en SLD atteints de la MH est relativement jeune et complexe, et les médicaments prescrits sont un élément crucial de leurs soins. De nombreux résidents sont aux stades avancés de la maladie, mais des facteurs autres que la progression de la maladie, comme l’accès à des soins informels et formels dans la collectivité, peuvent avoir une incidence sur le moment où les personnes atteintes de la MH sont admises dans un établissement de SLD.
L’analyse se penchait également, à partir des données cliniques disponibles, sur les soins dispensés aux patients atteints de la MH dans des cliniques de consultation externe. Les données sur la facturation des services à domicile et des médecins n’ont pas été analysées en raison des difficultés à identifier les patients atteints de la MH et de la couverture limitée des données dans les provinces et les territoires¸éé´Úé°ù±ð²Ô³¦±ð²õ12. Il serait utile de disposer de données cliniques plus riches au Canada et d’avoir plus de données sur les soins communautaires pour faire des liens entre les différents milieux de soins et ainsi brosser un meilleur portrait des soins aux patients atteints de la MH (et d’autres maladies rares) à différents stades de la maladie.
Ressources connexes
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1.
Société Huntington du Canada. . 2019.
2.
Société Huntington du Canada. 2021.
3.
Nance M, et al. . 2013.
4.
Coppen EM, Roos RAC. . Drugs. 2017.
5.
Ferguson MW, et al. . Journal of Central Nervous System Disease. 2022.
6.
Mustafa, FA. . The Lancet Psychiatry. 2017.
7.
Skirton H, et al. . Journal of Advanced Nursing. 2010.
8.
Etchegary, H. . Chronic Illness. 2011.
9.
Huntington’s Disease Society of America. . 2015.
10.
American Psychiatric Association. . 2013.
11.
Bénard A, et al. . BMJ Open. 2022.
12.
Institut canadien d’information sur la santé. Constatations relatives aux données utilisées dans les analyses sur les maladies rares. 2024.
Footnotes
i.
La forme juvénile de la MH représente environ 10 % des cas2. Le nombre de cas est donc trop faible pour les déclarer; étant donné que les symptômes et les pronostics sont différents, les patients ont été exclus de l’analyse.
ii.
Les AVQ comprennent l’hygiène personnelle, l’utilisation des toilettes, la locomotion et l’alimentation.
iii.
Les sous-groupes de substances chimiques correspondent au code de niveau 4 du système de classification ATC de l’OMS.
iv.
Les formes de traitement comprennent l’ergothérapie, la physiothérapie, la psychothérapie, l’orthophonie, la thérapie par les loisirs et l’inhalothérapie.
v.
L’Alberta est la seule province qui a fourni des données cliniques détaillées à l’ICIS; la transmission des données a récemment cessé. La couverture des données cliniques du SNISA de 2022-2023 repose donc sur une soumission partielle, tant en ce qui concerne le nombre de cliniques (patients atteints de la MH et d’autres maladies) ayant soumis des données que le moment où les soumissions ont cessé durant l’année. Les mesures liées aux visites étant sous-estimées, elles doivent être interprétées avec prudence. Les caractéristiques des patients sont similaires à celles des années précédentes pour lesquelles les données sont complètes. D’autres mesures figurant dans les données soumises par les cliniques, comme le nombre de visites par patient, les diagnostics et comorbidités consignées durant la visite, de même que la durée du trajet et la distance parcourue pour obtenir des soins, ne sont pas déclarées en raison de ces limites.
Comment citer ce contenu :
Institut canadien d’information sur la santé. Maladie de Huntington : regard sur les soins de longue durée, l’utilisation de médicaments et les visites en clinique. Consulté le 6 janvier 2025.
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